Biographie de Noël du Fail
Issu d’une famille de petite noblesse rurale, du Fail fait des études de droit et obtient une charge au Présidial de Rennes en 1552. En tant que magistrat, il rédige les Mémoires recueillis et extraits des plus notables et solennels arrests du Parlement de Bretagne(1579).
Ce parlementaire contemporain de Rabelais, véritable chantre de la Haute Bretagne de XVIe siècle, naquit vers 1520 dans le manoir familial de Château Letard à Saint-Erblon.
Son père François du Fail, était un gentilhomme rural de moyenne fortune et de moyenne noblesse dont la famille était établie sur cette terre depuis le XIVe siècle. Noël du Fail passa son enfance avec ses quatre frères et soeurs, au coeur d’une nature qu’il aimera et saura décrire, avant d’être envoyé à Vern où il fit ses premières humanités sous la direction d’un maître d’études, dénommé Caillard.
Comme il n’était pas l’aîné, Noël du Fail fut probablement destiné de bonne heure à la robe. Vers 1540, il quitta sa famille pour entreprendre des études juridiques. On le retrouve dans les universités de Poitiers, d’Angers, de Bourges, de Toulouse où il mena la joyeuse vie des étudiants de l’époque. Mais des problèmes financiers le conduisirent à interrompre ses études pour aller guerroyer en Italie. A Lyon, où il terminait sa formation universitaire, il publia en 1547, chez Jean de Tournes, ses « Propos rustiques » dans lesquels il met en scène quatre joyeux compères. Tableaux champêtres, faits et gestes des villageois du XVIe siècle, scènes truculentes ont pour cadre la campagne rennaise. Dans cette suite de conversations naturelles, les propos pleins de verve de Noël du Fail, révèlent un gentilhomme conservateur persuadé de la supériorité de la noblesse et très attaché à ses prérogatives. Au delà de l’éloge du métier d’agriculteur, l’auteur, s’inspirant des grands anciens tels Caton et Cicéron, se plait à rappeler aux paysans leur bonheur simple. Et surtout qu’ils se gardent bien de vouloir changer leur condition !
Aujourd’hui, du Fail est connu comme un des principaux conteurs de la Renaissance française, en particulier pour ses Propos rustiques (1547).
Le texte décrit la vie de deux villages des environs de Rennes (Vindelles et Flameaux) et dresse le portrait de quelques-uns de ses plus pittoresques habitants à travers les souvenirs de quatre vieux paysans. Oscillant entre la peinture bucolique et le comique rabelaisien, l’œuvre, complexe et doucement satirique, se prête à de multiples interprétations. Tout à fait remarquable par la richesse et la saveur de sa langue, elle demeure une des rares œuvres de notre littérature à s’être centrée exclusivement sur le monde paysan.
Les Baliverneries d’Eutrapel(1548) et les Les Contes et Discours d’Eutrapel (1585) sont de la même veine mais, cette fois-ci, des notables y sont mis en scène : le prudent Polygame, le fourbe Lupolde et le joyeux Eutrapel.
Le dialogue des trois hommes, mêlant réflexion morale et ironie, est le prétexte à une succession de fables et de tableaux descriptifs (fable de la goutte et de l’araignée, description d’une maison de paysans…). Les petites histoires à caractère comique et anecdotique sont d’abord là pour amuser le lecteur en un texte qui se veut avant tout divertissant. Mais derrière cette légèreté, la fantaisie verbale et le pittoresque des évocations, l’œuvre de Noël du Fail, comme celles de tous les grands conteurs humanistes de son époque, est constamment sous-tendue par un ensemble de réflexions morales, politiques et religieuses (Noël du Fail a été soupçonné de conversion au protestantisme) à la manière d’un Montaigne ou d’un Rabelais.
Du Fail est l’un des représentants les plus déclarés de cet « esprit de malice du bon vieux temps ». Il est le contemporain de toute une lignée d’esprits gaulois et fidèles à la tradition des fabliaux. Sainte-Beuve n’hésite pas à rapprocher Noël du Fail « du mouvement de littérature qu’avait suscité le prodigieux succès de l’auteur de Pantagruel ».
Après quelques mésaventures causées par les troubles de la Ligue, kidnappé lors d’une visite à sa nièce à Château Letard, sa famille fut rançonnée par un certain l’Essart de Vern, Noël du Fail s’éteignit à Rennes le 7 juillet 1591 sans descendance.